ANNEE ROMANE
L’EGLISE ST PIERRE ET ST-PAUL DE VEZIERES
Quelle est l’origine du nom de ce village qui fut l’une des quatre vigueries du Loudunais ?
En 969-970, nous la trouvons nommée Vicaria Vareciacinsis, puis Vareza en 1040, Vareria et Verreria en 1383. Quelque temps après, Varezia et Vézières en 1454. Au XVIIIè siècle, on retrouvera la forme Varèze. En fait, il s’agit de Varocia, villa d’un certain Varecius.
Vers 1040, un nommé Gaultier demeurant à Loudun, et sa femme Widburge donnèrent aux moines de l’abbaye de Saint-Florent un terrain peu ou pas cultivé, et ce cadeau fut refusé, mais les moines se sont ravisés et, finalement, acceptèrent cette région déserte nommée Sanctus Ciltronius ; les Loudunais ajoutèrent à cette libéralité l’église de Vézières, laquelle, selon Dumoustier de la Fond, fut donnée le 23 mai 1059 par Henri Ier aux bénédictins de Tournus. Il s’agissait d’un édifice mérovingien dont il ne reste aucune trace.
Ainsi se formèrent deux agglomérations ayant chacune une église. Les premières habitations de Saint citroïne ayant été construites par Foulques, moine de Saint-Martin vers 1082.
Il ne reste pratiquement rien de l’église de Saint-Citroïne.
Il ne reste rien non plus de l’église mérovingienne de Vézières à l’emplacement de laquelle on édifia cette construction du XIIe siècle, remaniée au XIIIe et XIVe siècles et que nous devons aux libéralités des seigneurs de Villiers. Un peu détachée du reste des maisons du nord du village, on peut l’admirer tout à loisir, depuis que le cimetière l’entourant a été supprimé.
De la route qui mène à Chinon, on remarque ce bel édifice qu’il est aisé de dater, mais, quand on approche, trois éléments heurtent péniblement les yeux ; d’abord, un banal appentis qui sert de sacristie, accolé au chœur sur la face nord ; un peu plus vers le couchant, le mur a été remanié et percé d’une fenêtre moderne rectangulaire. Enfin, une sorte de trottoir, récemment posé, et qui court sur presque tout se versant nord, est d’un bien fâcheux effet.
Main, ne nous arrêtons pas trop à ces quelques détails et admirons plutôt ce beau chevet roman à trois pans coupés appuyé sur de gros contreforts plats ; D’élégants modillons, sculptés sur le côté sud, ornent ce chevet qu’éclaire au centre une haute fenêtre en plein cintre ; Les deux autres, de la même facture, ont été murées ;
Le solide clocher carré qui s’élève au niveau du transept possède des frontons triangulaires au nord et au sud. Sur chaque face s’ouvrent deux fenêtres dont les arcs reposent sur des colonnettes aux chapiteaux sculptés de feuillages ; A l’est, le clocher n’a qu’une seule ouverture ; La tour ronde d’escalier est percée d’une étroite meurtrière. Trois contreforts consolident la base du clocher ; deux étroites fenêtres, de 15 cm sur 1,50 m, donnent un peu de jour à l’intérieur.
La façade est asymétrique ; à gauche, une fenêtre en plein cintre a été murée. Au centre, au-dessus de la porte et entre deux piliers, une fenêtre en ogive est surmontée d’une autre plus petite. Elles sont postérieures à l’édifice primitif. À cette façade est accolé, comme on le trouve souvent en Touraine, un préau couvert de tuiles et qui semble avoir été construit au XIVe siècle. Ce préau ne peut être comparé au proche habituel de nos églises, qui s’étend très peu au-delà de la porte d’entrée. Il s’agit d’un narthex extérieur qui occupe presque toute l’étendue de la façade.
Procope nous apprend que la première église à narthex : Sainte-Marie la Neuve, fut construite en 549, grâce aux libéralités de Justinien à Jérusalem. Saint Grégoire le Thaumaturge dit, que « les audientes doivent se tenir hors de la porte de l’oratoire ». C’est donc sous cet abri que des centaines de nouveau-nés, âgés de quelques heures seulement, firent une petite halte en attendant l’arrivée du prêtre qui devait les autoriser à entrer dans le Saint Lieu, pour y recevoir le sacrement du Baptême
Ajoutons que ce porche est éclairé au nord par deux fenêtres jumelées cintrées et par une seule de l’autre côté, cette dernière en ogive asymétrique ; La porte en cintre légèrement brisé ne présente aucune particularité.
L’examen de cette église du côté sud montre très nettement les différentes époques de construction : corbelets sculptés du chevet, mur sans ornements de la nef.
Les angles de la façade sont soutenus par de curieux contreforts dont celui de droite est coiffé d’un toit d’ardoise pyramidal surmonté d’une croix où tout au moins d’une sculpture en forme de croix.
Pénétrons maintenant dans le porche : la porte, encadrée de deux contreforts, présente une archivolte supérieure en plein cintre et une seconde au-dessus légèrement brisée. Mieux vaut, en pénétrant à l’intérieur, ne pas trop regarder le plafond de facture récente, ni le sol en ciment de l’allée centrale. Cette nef est éclairée au sud par trois fenêtres de tailles inégales. Le chœur était éclairé par trois fenêtres : celle de droite (côté de l’épître) est murée ; elle est surmontée d’un arc en bourrelet, surmonté lui-même d’une frise en dents de scie. Nous retrouvons cette même décoration à la fenêtre centrale.
L’arcature qui encadre le cintre du fond du chœur repose sur des chapiteaux : celui de gauche est sculpté de feuillages. Celui de droite est uni : tous les deux sont soutenus par trois colonnes engagées.
Devant le chœur, légèrement décroché par rapport à la nef, au niveau de l’arc triomphal, on voit sur le sol la trace de deux dalles funéraires dont l’une est recouverte de ciment !
Deux grands arcs en plein cintre, aux archivoltes cylindriques, dont certains sont sculptés, séparent la nef d’un collatéral. C’est dans cette partie de l’église que se trouve la pierre tombale de Guillaume du Riveau, seigneur de Villiers, de Vézières, et des Jedeaux. Dans le cartulaire de Fontevrault, il est dit qu’un certain Gilbert, seigneur de Villiers, signe « Gilbert bibit vinum » et, à dater de cette époque, le seigneur de Villiers prend le nom de VilliersBoivin. Elle passe, au XVe siècle, aux Durivau.
Ce Guillaume a dû prendre du service avec les chevaliers de Malte au cours d’une croisade en Terre Sainte, et fut prisonnier par les Turcs. Sur la pierre tombale assez mutilée, le seigneur de Villiers est revêtu de son armure ; l’encolure et le bas de la cotte sont ciselés. Son visage porte des éraflures, sa tête, aux cheveux bouclés, repose sur un coussin orné de glands. À ses pieds, un lion. On peut encore lire le début de l’inscription : « Ci-git le noble homme Guillaume Duriveau, seigneur de Villiers-Boivin, décédé le … ». Cette statue, classée monument historique, était masquée par un mur qui fut, fort heureusement, enlevé au XIXe siècle.
Ce collatéral s’étend sur la moitié de la longueur de l’édifice ; il est fermé par un mur auquel est appuyé un autel. Ce mur masque une petite salle rectangulaire murée également du côté du sanctuaire et où s’accumulent malheureusement gravats, détritus et objets cassés. Peut-être pourrait-on trouver, dans ce débarras, quelques objets intéressants.
Il s’agit très certainement d’une chapelle seigneuriale dont la voûte s’est effondrée, mais qui conserve encore quelques départs de colonnes et des chapiteaux bien mutilés.
Nous reparlerons de ces chapiteaux le mois prochain, ainsi que des tableaux qui ornent les murs de cette belle petite église. Puissent ces quelques lignes inciter les lecteurs à l’aller admirer : elle n’est qu’à trois lieues de Loudun.
Pierre DELAROCHE
LES OUTILS D'ANTAN
Jean-Luc Izar, habitant et collectionneur de Vézières, a rassemblé les outils ayant servi à la construction du cimetière de la commune. Les pointes seiches ont été offertes par Mme Blucheau. Son mari, maçon, a participé à la construction du mur et du portail.